Mathilde Rosier est née à Paris. Elle vit et travaille en Bourgogne (France) et à Bâle (Suisse).
Le travail de Mathilde Rosier découle de son intérêt pour l’expérience physique et psychologique des rites et rituels anciens. Elle construit des situations oniriques qui permettent au spectateur de perdre toute notion d’espace et de temps, ouvrant un portail entre les domaines conscients et inconscients. Mathilde Rosier crée des œuvres qui commentent et illustrent la nécessité de revenir à des modes harmo- nieux d’intégration de l’activité humaine dans l’« environnement naturel », y com- pris des pratiques préindustrielles qui peuvent sembler antirationnelles, en obser- vant le monde à partir du point de vue de la campagne actuelle.
Parmi les expositions personnelles qu’elle a récemment organisées, on peut citer Champ de vision au Mucem, Marseille (2023), Les Champs de prospérité Intensive à la Fondation Pernod Ricard à Paris (2023), Le Massacre du printemps au Museo MADRE, Naples (2020) ; MASP à Sao Paulo (2020) ; Figures of Climax of the Impersonal Empire à la Fondazione Guido Ludovico Luzzatto de Milan (2018)
Mathilde Rosier a participé à plusieurs expositions collectives telles que L’Ecorse, CRAC Alsace, FR (2023), De leur temps, FRAC Grand Large, Dunkerque (2023) , Chry- salis, Centre d’Art Contemporain Genève (2023), Emma Kunst Cosmos, Tabakalera Saint Sebastian (2022), Utopia Distopia : il mito del progresso partendo dal sud, Museo MADRE, Naples (2021) ; Kosmos Emma Kunz, Aargauer Kunsthaus, Aarau (2021), Me- tamorphoses - Let Everything Happen to You, Castello di Rivoli, Turin (2018)
Ses œuvres font partie de collections institutionnelles telles que celles du Musée d’Art Moderne et Contemporain Strasbourg, du Castello di Rivoli à Turin, du Mu- seum Abteiberg Mönchengladbach, le Museo Madre, Naples, le Centre National des Arts Plastiques à Paris, la Kunsthalle Hambourg, le Fond Art Contemporain de Paris, le MUCEM (Musée des civilisations de l’Europe et de la Mediterrannee) de Marseille, la Julia Stoschek Collection deDüsseldorf Center for Curatorial Studies Bard, US , Nicoletta Fiorucci Foundation, Fondazione Cassa di Risparmio di Cuneo. Deutsche Bank Frankfurt , DE, Deutsche Bank London, UK, UBS Art Collection.
Mathilde Rosier was born in Paris. She lives and works in Burgundy (France) and Basel (Switzerland).
Mathilde Rosier's work stems from her interest in the physical and psychological experience of ancient rites and rituals. She constructs dreamlike situations that allow the viewer to lose all sense of space and time, opening a portal between the conscious and unconscious realms. Mathilde Rosier creates works that comment on and illustrate the need to return to harmonious ways of integrating human activity into the “natural environment”, including pre-industrial practices that may seem anti-rational, by observing the world from the point of view of today's countryside.
Recent solo exhibitions include Champ de vision at the Mucem, Marseille (2023), Les Champs de prospérité Intensive at the Fondation Pernod Ricard in Paris (2023), Le Massacre du printemps at the Museo MADRE, Naples (2020); MASP in Sao Paulo (2020); Figures of Climax of the Impersonal Empire at the Fondazione Guido Ludovico Luzzatto in Milan (2018)
Mathilde Rosier has taken part in several group exhibitions including L'Ecorse, CRAC Alsace, FR (2023), De leur temps, FRAC Grand Large, Dunkerque (2023) , Chry- salis, Centre d'Art Contemporain Genève (2023), Emma Kunst Cosmos, Tabakalera Saint Sebastian (2022), Utopia Distopia: il mito del progresso partendo dal sud, Museo MADRE, Naples (2021); Kosmos Emma Kunz, Aargauer Kunsthaus, Aarau (2021), Me- tamorphoses - Let Everything Happen to You, Castello di Rivoli, Turin (2018)
Her works are part of institutional collections such as those of the Musée d'Art Moderne et Contemporain Strasbourg, the Castello di Rivoli in Turin, the Mu- seum Abteiberg Mönchengladbach, the Museo Madre, Naples, the Centre National des Arts Plastiques in Paris, the Kunsthalle Hamburg, the Fond Art Contemporain in Paris, the MUCEM (Musée des civilisations de l'Europe et de la Mediterrannee) in Marseille, the Julia Stoschek Collection in Düsseldorf Center for Curatorial Studies Bard, US , Nicoletta Fiorucci Foundation, Fondazione Cassa di Risparmio di Cuneo. Deutsche Bank Frankfurt , DE, Deutsche Bank London, UK, UBS Art Collection.
La démarche de Mathilde Rosier trouve son point de départ dans un élément clé de sa biographie : la décision qui l’a amenée dès la fin de ses études aux Beaux-Arts de Paris, à se retirer dans une bâtisse isolée, au cœur d’un environnement rural et agricole de- venu le sujet central de son œuvre depuis une vingtaine d’années.
Ce choix radical et délibéré - qui n’avait rien de pratique, ni de stratégique, après un début de carrière prometteur et deux séjours successifs dans les résidences internationales très connectées de la Rijksakademie à Amsterdam et de l’ISCP à New-York - comblait d’abord le sentiment d’un manque, d’un éloignement au vivant, et offrait la possibilité, dans un environnement dépourvu d’institutions culturelles, de laisser place à une autre forme de culture, en l’occurrence un régime agriculturel presque entière- ment absent du champ de l’art à l’époque. Situé au cœur d’une région partagée entre domaines viticoles et grandes exploitations, ce nouveau mode de vie plus solitaire, précurseur d’un retour à la terre désormais au centre de l’actualité, ancrait simultanément le quotidien de l’artiste dans la diversité des relations au vivant et dans une confrontation à soi.
Dans la première phase de cette recherche, l’artiste s’est appuyée sur l’histoire de la psychologie et sur l’hypothèse qui situe dans l’inconscient la seule proximité authentique avec la nature, une survivance de l’état sauvage en contraste avec le moi conscient et civilisé. Dans l’expression qu’en donne Mathilde Rosier, elle ap- paraît sous forme de scènes théâtralisées et ambiguës, évoquant les contes ou la mythologie, dans lesquelles des figures humaines parfois indistinctes cohabitent avec des animaux plus ou moins familiers : animaux de compagnie (chiens, chats, chevaux), commensaux (chouettes posées sur des décors de carton, singes musiciens) ou animaux sauvages mais captifs comme ces félins et ces aras, respectivement circonscrits au périmètre d’une armoire ou d’un lit à baldaquin.
Depuis quelques années, ces représentations d’une nature do- mestiquée trouvent leur prolongement dans une nouvelle série où bourgeonnent des corps hybrides aux membres végétaux, coiffés de têtes d’épis, balayés par les vents, entre les rangées de plantes céréalières et les empreintes des machines agricoles. Regroupées sous l’intitulé In the field of intensive prosperity, ces images évoquent à la fois l’expérience mentale de dissolution dans le vivant à laquelle se soumet l’artiste, l’intensité du lien à son environnement, et celle qu’induisent les modalités de l’agriculture industrielle ; la parenté immédiate de la plante et de l’humain et l’exploitation intensive de l’une par l’autre. S’il pouvait être question dans les précédents travaux de communier avec le monde, il s’agit ici de faire corps avec lui.
Qu’il soit traité sous forme de peintures, de dessins, d’assemblages, de films, de costumes ou de performances, ce thème continu s’ex- prime dans une veine qui peut rappeler l’art des symbolistes, l’art décoratif des théâtres ou des ballets voire les ornements typiques de certaines œuvres aborigènes. Mais il y aurait un contresens à penser que ces images renvoient à autre chose qu’elles-mêmes. Elles témoignent au contraire d’un “art de l’attention”, pour employer la formule d’Estelle Zhong Mengual à propos de certaines femmes naturalistes du 19e siècle, qui considère la nature comme un sujet et qui en célèbre la parenté retrouvée.
Thierry Leviez
Texte pour le prix Aware (Archive of Women Artists) 2022
The way Mathilde Rosier works finds its starting point in a key aspect of her biography: the decision which led her at the end of her studies at the Beaux-Arts in Paris, to retire to an isolated building at the heart of a rural and agricultural environment, which has been the central subject of her work for the last 20 years.
This radical and deliberate choice – which was in no way practical or strategic after the promising beginnings of her career and two successive international residencies [which allowed for art world connections] at the Rijksakademie in Amsterdam and the ISCP in New York – filled firstly the feeling of a ‘lack’, of an estrangement from the living, and also offered the possibility, in an environment removed from cultural institutions, to leave the space for another type of culture, in this case an agri/cultural regime almost entirely absent from the field of art at the time. At the heart of a region shared between wine estates and large farms, this new, solitary, way of living – precursor of the return to the land which is now at the centre of current affairs – anchored the day-to-day life of the artist, both in the diversity of relationships with living things, and in a confrontation with the self.
In the first phase of this research, the artist turned to the history of psychology and to the hypothesis that the only authentic link to nature lies in the unconscious, a relic of our primitive state which contrasts with the civilised and conscious self. It is expressed by Mathilde Rosier through its appearance in the form of dramatised, ambiguous scenes, recalling fairy tales or mythology, in which sometimes indistinct human figures coexist with more or less familiar animals: pets (dogs, cats, horses), commensals (owls placed on cardboard decorations, musical monkeys) or wild but captive animals, like those felines or macaws, restricted to the bounds of a wardrobe or of a four-post bed, respectively.
For a few years now, these representations of domesticated nature have continued in a new series, where hybrid bodies topped with ears of corn, blown by the winds, between the rows of cereal plants and the marks left by agricultural machinery, bud with vegetal limbs. Grouped together under the title In the Fields of Intensive Prosperity (2019-2021), these images evoke simultaneously the mental experience of dissolution in living things which the artist submits to, the intensity of her link with her environment, and that which is induced by industrial agricultural methods; the immediate kinship between plant and human, and the intensive exploitation of one by the other. If her earlier works were ways of communing with the world, these works are about becoming one with it.
Whether treated through paintings, drawings, assemblages, films, costumes, or performances, this theme continues to express itself, in a way which could recall symbolist art, the decorative art of the theatre or ballet, or even the ornaments common in certain Indigenous works. But it is also counterintuitive to think that these images refer to anything but themselves. Rather, they are proof of an “art of attention”, to use Estelle Zhong Mengual’s phrase about naturalist women of the 21st century, who consider nature as a subject and who celebrate a return to it.
Thierry Leviez
Text for the Aware Price 2022